Le Costa Rica se met au vert

La Riche Côte au vert

Un petit oiseau vert et rouge, s’agite dans les airs d’une des nombreuses forêts nuageuses du pays : le quetzal. Le paresseux, lui, suspendu aux branches d’un cecropia, dors 18h par jour sur les côtes pacifiques et caribéennes. Parfaitement camouflé dans le vert de sa forêt tropicale, la rainette au yeux rouges, grenouille de 59mm, n’apparaîtra qu’aux yeux des visiteurs les plus chanceux. Ici, tapir, caïmans, tortus, toucan, singe capucin, perroquets et bien d’autres espèces végétales comme animales cohabitent dans les 27 parcs nationaux du pays.

Nous sommes dans un pays d’Amérique Centrale entre le Nicaragua au nord et le Panama au sud-est, la mer des Caraïbes au nord-est et l’océan Pacifique au sud-ouest : Bienvenu au Costa Rica.

5 millions d’habitants, 10 fois plus petit que la France, PIB par hab : 9 238 %%EDITORCONTENT%%nbsp;. Véritable jardin d’Eden au climat tropical, le soleil y est présent 300 jours par an cédant de temps en temps sa place à des pluies torrentielles.

Fort de sa variété ce petit bout de paradis n’abrite pas moins de 500 000 espèces animales et végétales soit environ 5% de la biodiversité mondiale à elle seule (France : 97 094 espèces en métropole / 87 819 en outre-mer).

La politique du Costa Rica est centrée sur la préservation de son environnement et de sa biodiversité, sur l’éducation ainsi que sur la santé, le taux de chômage est un des plus faibles du continent (9.1% en 2017) et le taux d’alphabétisation est de 97.8% (2018).

Bon, maintenant que je vous ai fait un petit tour d’horizon, parlons peu parlons bien.

OK.

Le Costa Rica à une des politiques les plus prolifiques du monde en matière d’environnement. Le Champion de la Terre 2019 a mis au point un plan visant à supprimer ses émissions de CO2 d’ici 2050 et d’atteindre la neutralité carbone en 2021, ce qui ferait du Costa Rica le premier pays décarboné au monde. Pour comparer, l’Union Européenne et L’ONU (accord de Paris) ont pour objectif d’atteindre la neutralité carbone (processus visant à compenser les émissions de CO2 pour que les rejets dans l’environnement soient réduits à zéro, en gros on autorise la combustion du charbon, du pétrole et de l’essence, à condition que leurs émissions de gaz à effet de serre soient compensées ailleurs, comme planter des arbres) pour 2050. Certes, les enjeux et problématiques ne sont pas les mêmes. Mais tout même, il est impressionnant de voir un pays avec bien moins de moyens se fixer des objectifs aussi ambitieux et responsables.

Mais comment c’était avant ?

Le Costa Rica a toujours été humainement en avance sur son temps. Ses grands hommes politiques, républicains comme socialistes étaient réellement soucieux de la population et de l’avenir du pays.

En 1940, Calderon, chirurgien et républicain, accède à la présidence :  système de sécurité sociale, salaire minimum, Code du travail, retraite, l’Université du Costa Rica et distribution de chaussures aux plus démunis : c’est lui.

8 ans plus tard, Figueres, « fermier socialiste » lance un coup d’état contre le parti de Calderon. Une guerre civile éclate, après 44 jours sanglants, le bilan est lourd : + de 2000 morts. Un Figueres gagnant se proclame président provisoire. Abolition de l’armée, droite de vote aux femmes, protection sociales, éducation garantie pour tous : c’est lui. Il laissera ensuite la place à l’opposition puis reviendra pour 2 mandats présidentiels en 1953 puis en 1970.

Pendant les années 70, les réformes sociales ont eu un coût tel que l’économie du pays reposait sur les cultures de café, de bananes, d’ananas (1er producteur d’ananas au monde) et sur des levées de fonds. Les multinationales étrangères déboisaient à tout va pour étendre leurs champs, cela représentait 100 000ha de forêts abattues par an. Dans ces plantations, les pesticides les plus concentrés au monde y sont vaporisés. Autant dire qu’on est loin du pays le plus écolo au monde.

Il faudra attendre la fin des 80s pour que le gouvernement passe à l’action et remarque l’étendue des dégâts. Le constat est grave : Le Costa Rica a perdu deux tiers de son espace forestier.

En 1990, la production de café chute, le tourisme quant à lui est en plein boom. La décision ne se fait pas attendre, les dirigeants décident d’orienter leur économie vers le tourisme écolo.

Ce qui fut une erreur n’en est pas restée une, ce petit pays devient la première nation tropicale à inverser le processus de déforestation.

Puis c’est en 1998 que le Costa Rica votera la loi sur la biodiversité.

Objectif : 100% D’ÉNERGIES RENOUVELABLES

« Costa Rica se ha propuesto luchar contra el cambio climático con el ejemplo, es momento de arrollarnos las mangas y trabajar por nuestro planeta» Carlos Alvarado Quesada, président, présentant le Plan national de décarbonisation à Standford, le 14/03/19.

En 2017, le pays parvient à fournir 100% de son électricité en énergies renouvelables (ENR) pendant 300 jours. En 2019, c’est 99.99% de l’électricité du Costa Rica qui provient d’ENR (100% en mai 2019). Ce qui est énorme, seule l’Islande génère 100% de son énergie de cette manière, mais sans parvenir à réduire son empreinte carbone. L’énergie des Costaricains repose sur l’hydraulique (80,04%) la géothermie (12.9%), l’éolien (6.99%) et le reste en biomasse et solaire.

Il faut savoir qu’en 15 ans, le pays est passée d’une société rurale à urbaine. San José, la capitale accueille 2.5millions d’habitants soit la moitié de la population. Autant vous dire, que le gouvernement n’était pas prêt pour un tel changement, par exemple, un seul train circule dans San José… n’imaginons pas ce que donne, tri et eaux usées.

Comme pour l’Islande, La neutralité carbone reste un défi d’envergure, l’électricité du pays à beau être propre, le reste l’est moins. En effet, l’électricité représente 21.7% de l’énergie consommée, 15.1% pour la biomasse mais surtout 64.9% pour les produits pétroliers consommés par les transport et l’industrie.

En 2018, les émissions de carbone liées à l’énergie représentaient tout de même 1.53 t de CO2, soit 65% de moins que la moyenne mondiale.

En 2019, le Président Alvarado projette d’électrifier ces secteurs afin d’atteindre ses objectifs de décarbonisation.

Bref, en 2050, tout doit être clean.

L’obstacle numéro 1 dans ce plan est le transport qui représente 54% des émissions de CO2 du pays et 66% de la consommation d’hydrocarbure. Plus que tout autre secteur, le transport est donc une priorité.

Le numéro 2 : trouver un terrain d’entente avec les multinationales de l’agroalimentaire, l’agriculture et d’élevage et convertir les énergies fossiles (hydrocarbure) du transport de marchandise en ENR.

Le 3 : réorganiser la gestion des déchets et des eaux usées.

Tout cela représente un coût financier important quand les moyens du Costa Rica sont loin d’être légion.

Ainsi, avec comme deadline 2050, le plan prévoit :

  • À l’horizon 2035 de faire rouler à l’électrique 70% des bus et des taxis (100% en 2050) et 35% des véhicules particuliers. Les ventes de voitures neuves à forte émission de C02 seront bannies et remplacées par un parc automobile à émissions nulles, la promotion des voitures partagées autonomes et un vaste réseau de recharge électrique.
  • En 2040, réduire de 50% le nombre de voiture circulant dans les zones urbaines.
  • Mettre en place une ligne de trains électriques transportant jusqu’à 250 000 personnes reliant 15 quartiers de San José.
  • Réduire l’impact environnemental du transport de marchandise.
  • Construire des bâtiments à faibles émission de CO2, utilisant des énergies renouvelables dans les processus de chauffage et d’eau chaude.
  • D’ici 2030, améliorer le secteur industriel en appliquant des processus électriques, durables et plus efficaces à faible impact environnemental sur toutes les étapes du cycle de vie d’un produit, de la conception jusqu’à sa fin de vie.
  • Ré-organiser le système de gestion des déchets en se concentrant sur le tri, la réutilisation et l’élimination des déchets à faibles émission de carbone.
  • La mise en place de nouvelles normes technologiques pour l’agriculture, l’agroalimentaire et l’élevage : ces secteurs seront soumis aux dernières technologies conformes aux normes de durabilité, de réduction des émissions et de compétitivité.
  • La protection de la biodiversité : en 1980 seul 20% du territoire était couverte de forêt (déforestation causée par les agriculteurs), en 2019 c’est 52% du territoire et en 2030 le gouvernement prévoit 60%.

Quand on veut on peut

Depuis ces beaux discours, centrales hydroélectriques, géothermiques et parcs éoliens se développent, se modernisent et apparaissent dans le paysage boisé de la côte.

Rappelons que : 64.9% de la consommation d’énergie concerne le pétrole, contre 34.7% pour les ENR. Dû à l’industrialisation et l’exode urbaine dans le pays, ainsi malgré les efforts les ENR n’auront pas réussi à rattraper la consommation d’hydrocarbure. Les ENR auront progressé de 108% entre 1990 et 2018 contre 224% pour les énergies fossiles…

Rappelons aussi que, la production, elle, a bien changée : entre 1990 et 2018 la production d’électricité augmente de 232% dont seulement 1.4% d’hydrocarbure pour 98.6% d’énergies propres jusqu’à atteindre 99.99% en 2019.

Donc, on est bon niveau production mais les habitudes de consommations restent une problématique de taille.

L’énergie au Costa Rica, se caractérise par ses centrales hydrauliques qui représentent plus de 70% de la production d’électricité, l’hydraulique repose sur l’énergie cinétique émis par un courant d’eau ou sur la différence de niveau qui est convertie en énergie mécanique par une turbine hydraulique puis en énergie électrique. Faible coût et faibles émissions de gaz à effet de serre : benef.

On peut récolter de l’énergie hydraulique par le biais de centrales dites gravitaires (dépendantes des précipitations car elles utilisent le flot d’eau amené par la gravité et le cycle de l’eau), d’usines maritimes (marées, vagues ou courants marins) et les STEP (stations de transfert d’énergie par pompage) dont la puissance dépend de la hauteur de la chute d’eau, puisqu’on récolte l’énergie provoquée par le débit entre l’eau du bassin supérieur et le bassin inférieur.

On pourra aussi apercevoir quelque centrale biomasse (énergie la plus ancienne utilisée par l’homme qui consiste à brûler des déchets organiques (principalement le bois et les végétaux agricoles) produisant chaleur et électricité. Ainsi que des parcs éoliens, ou encore des centrales géothermiques (énergie issue de la terre convertie en chaleur puis en électricité, pour faire simple on fait circuler un fluide dans les profondeurs de la Terre, le fluide se réchauffe et remonte chargée d’énergie thermique convertie ensuite en électricité dans l’idéal la centrale est positionnée près d’un volcan.

Ainsi le Costa Rica dispose de barrage hydraulique tel que le barrage de Reventazon (306MW) qui alimente 525 000 foyers en électricité. Une future centrale, celle d’El Diquis (650MW) est prévue pour 2025 mais obstrué par l’opposition des populations amérindiennes. De plusieurs centrales Géothermiques comme à Miravalles dissimulées dans les forêts du volcan du même nom ou encore de parcs éoliens ou de centrales solaires.

Dans le monde

Nous l’avons vu, les problématiques de la décarbonisation sont nombreuses, déjà pour un petit pays comme le Costa Rica, il devient alors anti-productif de comparer entre elles les régions du monde puisque chacune abrite des obstacles propres à leur culture ou développement.

Cependant, en Amérique comme en Europe, de nombreux pays se sont engagés vers des ressources plus vertes et plus saines.

Le Costa Rica reste tout de même un exemple, il fait partie des pays ayant pris des mesures et établis un plan des plus détaillé au monde.

Son objectif de devenir le premier pays décarbonisé et fonctionnant uniquement aux énergies renouvelables n’est pas qu’un rêve, il dissimule une ambition : celle de porter les générations futures vers un avenir plus radieux.

Sa démarche est à saluer et prouve encore une fois qu’il ne suffit pas de débattre mais bien d’agir pour montrer l’exemple. Etape par étape, seconde par seconde, chaque pas compte pour atteindre l’objectif fixé.

 

Pour comparer un peu, on a fait une petite story sur les énergies vertes en France.



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